GILLES FISCHER : LES YEUX DU HIP-HOP BELGE
Rédaction : Olivier Sogan / photos du vernissage : Christophe Dehousse
Du 2 au 17 mars 2019, le hip-hop est là où on ne l’attend pas : installé contre les murs de l’auditorium et fixé sur les vitres de la verrière, au Grand Curtius. Avec Hip Hop Philosophy - Les visages du hip-hop belge, l’expo signée Gilles Fischer montre ceux qui ont fait éclore cette culture en Belgique et qui, aujourd’hui plus que jamais, travaillent activement afin d’offrir à leur passion une place de choix dans l’univers artistique local. Visite guidée !
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Dj Sonar © Christophe Dehousse[/caption]
Deejay Sonar, monument du hip-hop liégeois, installe ses platines dans l’auditorium du Grand Curtius. Le bonhomme fête ses 30 ans de carrière, avec les mêmes platines qu’il avait au tout début. Pour l’occasion, il s’apprête à mixer pour Gilles Fischer qui, agité mais souriant, règle les derniers détails. Le photographe a beaucoup à penser : ce vernissage n’est pas seulement l’occasion de montrer son travail aux yeux de tous. L’intention est de réunir, au sein même du Grand Curtius, les quatre branches dominantes du hip-hop. Tout est prévu : DJ, graff, rap et danse. Sonar aux platines, Mino du collectif RAB, Kriza Krz en showcase et Kevin Messabeb sur la piste. Tous ont d’ailleurs posé pour le verviétois d’origine et font partie de l’exposition.
Presque six ans de gestation : l’accouchement est imminent
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Gilles Fischer © Christophe Dehousse[/caption]
Entouré de ses clichés, Fischer se confie sur les débuts de la série : « le premier, c’était Sonar. Il avait un projet qui s’appelle Escalator, je l’ai donc photographié… devant un escalator ! ». Il s’est donné un cadre pour ce travail : immortaliser les artistes dans leur environnement pour avoir un rendu qui leur ressemble. Autres contraintes : utiliser une focale de 35 mm à chaque fois, jamais de flash, du noir et blanc, des photos plein-pied avec un geste de la main… des restrictions parfois contraignantes sur une si longue série : chaque personnalité à ses particularités, chaque lieu de shooting
doit être apprivoisé. Résultat final ? Harmonie, puissance et authenticité. L’esthétique est le fil rouge qui conduit d’image en image le spectateur. « J’ai choisi celles exposées en fonction de l’esthétique de la photo plutôt que de mes affinités avec les artistes. Tous ceux que je shoot me plaisent, alors je ne peux pas sélectionner en fonction de ce critère »,
déclare Gilles.
L’artistique avant tout, certes, mais une démarche d’activiste en filigrane. Organisée par le service de proximité de la Ville de Liège via le projet Unity and Diversity, l’expo ambitionne d’amener la culture hip-hop «
où on ne l’attend pas », explique Romina Carota. Gestionnaire en charge dudit projet, cette dernière ajoute : « l’idée est de valoriser les cultures urbaines comme étant des outils pédagogiques utiles et efficaces dans les quartiers, afin de mettre en avant les artistes hip-hop ».
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© Christophe Dehousse[/caption]
Une discipline qui transcende les affrontements et qui a sa place au musée
A en croire Jean-Pierre Hupkens, Échevin liégeois en charge de la Culture, du Tourisme et de l’Interculturalité (on retrouve dans son portefeuille la culture urbaine) : «
cela fait partie du trajet de la reconnaissance du hip-hop. On s’est appliqué, avec la ville de Liège, à combler ce déficit en soutenant différentes manifestations. La faire entrer dans un musée, lieu de la culture reconnue et installée, est aussi participe de cette forme de reconnaissance ».
Une reconnaissance parfois boudée par les lieux-dits de cultures, mais qui finira par ne plus l’être : force est de constater que l’événement est un succès.
Après un tour dans la verrière, les amateurs se retrouvent dans l’auditorium où Dj Sonar mixe devant une salle pleine à craquer. Après son set, ce dernier laisse la place Kriza Krz, pour son showcase. Accompagné aux platines et aux chœurs par Dj Loco et Mell’n’K, le rappeur liégeois fait bouger têtes et corps de son rap introspectif, transcendé d’ondes positives. Derrière lui trône le tableau du bruxellois Mino : des lettrages tagués sur des tons noirs et gris. Quelques titres plus tard, l’interprète de
Epouse Moi s’éclipse. Kevin Messabeb entre sur la piste et exécute, entouré du public, une belle prestation.
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Kriza Krz @ Christophe Dehousse[/caption]
Le vernissage s’est achevé sur ces pas de danses nourri d’applaudissements mais l’exposition est encore visible au Grand Curtius. On peut admirer, prenant la pose, le groupe de rap Indocile, la danseuse Sam Mavinga, le graffeur Jaba ou encore le collectif de Dj Bruxellois Supafly collectif. De Bruxelles à Namur, en passant par Verviers et Liège, Gilles Fischer nous offre un tour d’horizon des figures du hip-hop belge.