JO DESSINE UN PEU, BEAUCOUP, PASSIONNÉMENT
Interview : Nader Mansour // Rédaction : Ludovic Minon, Naomi Bussaglia // Photos : Simon Verjus
Illustrateur et sérigraphe artisanal, ses oeuvres peuvent être vues au Trinkhall Museum et au Stalon, pour ne citer qu'eux. Nous sommes partis à la rencontre de Jo Delannoy, alias Jo dessine un peu. Portrait d’un hyperactif de l’image, à suivre.
« Il était une fois trois petites couleurs. Rouge est toujours survolté, Jaune est calme et effacé, Bleu est râleur et solitaire. Elles se chamaillent sans arrêt pour savoir de quoi leur livre va parler. De page en page, elles s’assemblent pour créer. Créer des forêts, des châteaux, des dinosaures, des villes… Arrivées à la dernière page, elles se disent qu’elles n’ont rien eu le temps de raconter. Mais si : elles ont raconté qu’en s’écoutant les uns les autres, on peut faire tout ce qu’on veut. »
Des histoires comme celle-ci, Jo Delannoy en a plein ses marqueurs. « Celle-ci est l’histoire d’un fanzine que j’ai réalisé » continue-t-il le sourire aux lèvres. « Je dessine constamment. » L’histoire de Jo lui-même, elle, est avant-tout celle d’un hyperactif. « Je pense qu’il ne faut jamais s’arrêter de faire quelque chose qu’on a envie de faire » développe-t-il. Une punchline représentative ? « On n’apprend pas à un vieux singe à mettre la charrette sans casser les oeufs ! » « C’est un mélange de plusieurs proverbes. Je suis un peu une éponge, je m’accroche à plein d’autres énergies. Je n’ai pas vraiment de leitmotiv et je pars souvent dans tous les sens. »
Dans les ateliers RhizHome du quartier Sainte-Marguerite où il accueille l’équipe de Quatremille, l’artiste a recouvert les murs de ses oeuvres, rien que pour l’occasion. Aux côtés de ses milles et un dessins, un pan entier est orné d’affiches politiques détournées. « Être artiste, c’est l’occasion d’être engagé. Je n’aime pas les trucs violents, mais j’aime bien me marrer. Si je peux m’engager avec de l’humour dans mes images, c’est top ! »
On s’engage comme on peut — Naomi Bussaglia On ne peut pas nier que l’art est une manière de s’exprimer. Nous vivons dans une ville qui prône l’art et la culture, avec plusieurs écoles d’art plastique et de la scène, une Académie, des musées de renommée, des expositions et événements qui poussent de partout, nous étions alors voués un jour à tomber sur un artiste engagé politiquement. Mais s’engager politiquement, signifie parfois tourner en dérision ce qui nous turlupine. Comprendre que certains s’engagent dans une révolte, tandis que d’autres sont eux encouragés par des politiques. Jo se présente comme un activiste culturel dans la ville. « On est tous engagés, sinon ce qu’on fait c’est de la déco » dit-il avant de nous montrer les dizaines d’affiches accrochées sur un des murs de la vieille maison liégeoise. Ces affiches représentent chacune des personnalités politiques différentes, de Belgique et d’ailleurs. Le twist ? De grosses marques et écritures rouges par dessus les portraits des ministres, un peu à la sauce d’un ado en colère qui gribouille sur des pubs pour passer le temps. Jo nous explique alors que ce projet est né afin d’introduire la politique dans la vie des élèves d’écoles secondaires. « Pour faire comprendre aux futurs votants que ce qu’on voit en façade n’est pas toujours la réalité. » Les écritures rouges reprennent toutes des paroles de chansons, tournant alors en dérision les partis politiques de certains, et les positions d’autres. Pour Jo, ce projet et tous les autres qu’il entreprend sont un bon exemple de son travail : ils sont éphémères. Ce qui lui plaît par dessus tout dans la sérigraphie, c’est qu’une image peut être reproduite autant de fois qu’il le désire, et qu’au final plein de citoyens pourraient se retrouver avec une partie du projet chez eux. Ici, la finalité de son travail est tout le contraire d’unique, elle représente une parcelle d’un tout. Pour faire partie du tout de Jo, retrouvez son travail sur les réseaux sociaux @jodessineunpeu. |
D’un enthousiasme à toute épreuve, Jo ne semble jamais s’arrêter de rire. « J’ai voulu faire du théâtre après ma rhéto, mais une prof m’a dit que je ne serai jamais comédien. » confie Jo. « Je me suis alors orienté vers le dessin. J’ai ensuite découvert la sérigraphie après mon erasmus. » « J’aime bien les rituels, tous les procédés, la préparation du matériel… » explique-t-il. « Et j’aime diffuser mon travail dans plein de villes différentes. Faire une image en série, l’imprimer, et penser qu’un tas de personnes vont avoir une petite image chez elle ! »
Retrouvez l'interview de JO pour Quatremille en 2017 :