VEENCE HANAO – L’INTIME EN ÉCHO
Rédaction : Anaïse Lafontaine // Photographies : Gilles Fischer
Jeudi dernier, le Reflektor accueillait Veence Hanao et Le Motel pour les livrer à un public éclectique. Après quelques années de pause, le chanteur a concocté un album de neuf titres, Bodies, avec l’aide du jeune producteur désormais connu de tous pour ses diverses collaborations de qualité. Retour sur cette soirée où ces oiseaux de nuit qui ont définitivement fait leur nid sur la scène hip-hop belge ont conquis le public du Reflektor. Errance Le début de soirée ne s’annonçait pas trépidant. Les silhouettes se faisaient rares dans l’espace concert, se regroupant plutôt au bar. Le set de Turtle Master, qui assurait la première partie, a toutefois fait se déhancher les danseurs du jeudi soir malgré un petit problème technique. Ces débuts timides se sont faits doucement oublier au cours de la soirée. Le public était réceptif et les têtes dodelinantes se sont peu à peu rassemblées à l’avant de la scène pour observer de plus près celui qu’ils étaient venus écouter. Pour ma part, je me suis faufilée au devant de la scène afin de ne pas rater une miette de la poésie du rappeur. Obscurité L’espace scénique était très peu éclairé, faisant résonance aux thématiques phares de Veence Hanao – la nuit, les soirées, le flou des relations amoureuses – et faisant ressortir la noirceur de certains de ses textes. Le noir complet, avec quelques ampoules éclairantes. Sur certaines chansons, le chanteur s’amuse même avec une lampe de poche. Avec un cynisme déconcertant, il nous raconte en douceur ses histoires. Sa voix chuchote et s’arrête, le rappeur ne cesse de jouer avec des rythmes et des expressions vocales qui lui sont propres. J’affectionne beaucoup sa manière de rapper car elle renforce le sens de ses textes métaphoriques. Le Motel est pour sa part resté en retrait, concentré derrière ses platines, tout en suivant d’un regard bienveillant Veence se mouvoir sur la scène. Celui-ci a mis le public liégeois à contribution à de nombreuses reprises en l’incitant à ne pas faillir à sa réputation. La musique de Veence Hanao et Le Motel se vit et se danse, chacun à son rythme. Audace Le pied posé sur un baffle, Veence Hanao nous a décrié sans faillir ses louanges à la nuit et au mal-être de cette génération de trentenaires cassés à laquelle il semble se heurter avec un regard exacerbé mais séduisant. Paradoxes qui s’entrechoquent, la question de la fête, de la nuit, de la jungle, de ces pauvres humains chercheurs de sens que nous sommes, de l’amour et du sexe ne semblent jamais quitter l’artiste. En plus de ses textes, ses clips en disent long sur sa vision de tout cela et font sans aucun doute écho aux pensées de nombreuses personnes. Le rappeur nous a livré un texte a cappella, impressionnant d’adresse et le concert s’est terminé sur une chanson exclusive, jouée pour la première fois en live. J’ai découvert et redécouvert cet artiste sous un angle nouveau. Le temps du concert m’a paru très court, mais intense, signe que nous nous sommes bien amusés, ou que l’on a bien réfléchi. La voix douce de Veence Hanao persiste aux effets de studio et ses jeux de rythme amplifient son écriture puissante et poétique. Le spleen moderne de l’artiste a fait office de thérapie de groupe et de tachycardie collective.

























